OJapon
par 11 Mars 2017
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Associé aujourd’hui encore aux Yakuza, le tatouage japonais est toujours mal vu sur l’archipel car inexorablement lié à la criminalité ! Ces tatouages impressionnant qui couvrent l’ensemble ou une grande partie du corps à l’exception du visage et des extrémités se nomme Irezumi ou Horimono.

Il faut cependant remonter bien avant l’ère de la mafia locale pour voir apparaitre l’évocation du tatouage dans la culture japonaise. Les primo habitants du Japon (au IIIème siècle), le peuple Ainou, utilisaient déjà le tatouage pour se distinguer entre eux.

Certains métiers et particulièrement les pécheurs étaient tatoués pour se protéger des esprits lorsqu’ils prenaient la mer.

A l’arrivée du Bouddhisme et de la pensée chinoise sur le sol japonais, le tatouage a été assimilé à une pratique barbare et a été détourné de sa fonction première de protection pour devenir une marque de punition (Bokukei) apposée sur les criminels.

Encore montrés du doigt dans notre société actuelle, les tatouages sont victimes de l’image véhiculé par les yakuza et ont toujours mauvaise presse auprès des japonais et surtout auprès des seniors, même si cela commence à s’atténuer. Il faut savoir que dans le milieu de la mafia japonaise, l’épreuve du tatouage est un test ultime de courage et d’endurance.

Ces tatouages de par leur grandeur et du fait de leur symbolique très stricte sont longs, difficiles et surtout très douloureux à réaliser. Aujourd’hui, de nombreux membres de gang tentent, dans un souci de discrétion, de faire disparaitre leur tatouage.

La discrimination sur les porteurs de tatouages diminue mais on peut encore voir des endroits publics comme les bains ou les salles de sports refusant l’entrée de leur établissement aux personnes tatouées. Et pourtant, le tatouage japonais dans sa forme traditionnel est un art à part entière qui demande une grande dextérité et une maitrise extraordinaire du métier de tatoueur.

Son exercice est très codifié et répond à des exigences aussi bien dans la réalisation que dans la symbolique. On retrouve trois grands types de tatouages : le Donburi Soushinbori qui s’étend sur l’ensemble du corps du cou jusqu’aux chevilles, le tatouage de poitrine nommé le Hikae et le Kame-no-koh qui recouvre entièrement le dos.

Pour la symbolique, les ornements utilisés sont souvent le chrysanthème qui figure la détermination, la fleur de cerisier qui représente l’impermanence de toute chose et la Pivoine, image de la richesse.

Pour les animaux, on retrouve le plus souvent le serpent, le dragon ou la carpe koï et pour les personnages, la geisha, le samouraï et le Bouddha sont les plus représentés. L’ère Edo réhabilite un peu le tatouage en distinguant celui du héros et celui du bandit. Le tatouage décoratif émerge peu à peu. Sous l’ère Meiji, retournement de situation.

Le gouvernement décide de déclarer la guerre aux tatouages et ceux-ci deviennent prohibés et de nouveaux associés au milieu du crime. L’art se pratique alors en secret. En 1945, sous l’occupation américaine, le tatouage est remis au gout du jour mais son image reste pourtant néfaste. Malgré cela, le tatouage gagne en popularité auprès de la jeunesse japonaise.

Toutefois, à la forme traditionnelle, ces nouveaux adeptes lui préfèrent les petits tatouages occidentaux plus rapides et moins couteux. L’Irezumi qui est réalisé par un vrai tatoueur traditionnel est douloureux, long et très couteux.

Milieu très fermé, il est difficile de trouver un de ces artistes (Horishi) et bien souvent les contacts se font essentiellement par le biais du bouche à oreille. La transmission du savoir se fait de maitre à élève et demande de nombreuses années d’apprentissage avant que celui-ci ne soit capable et surtout autorisé à concevoir son premier tatouage sur un client.

Certains tatoueurs traditionnels ou artisans tatoueurs utilisent encore la méthode du Tebori (couper à la main) qui consiste à tatouer de façon manuelle et répétitive avec des aiguilles fixées au bout d’un manche en bois ou en métal. Le son provoqué par l’aiguille sur la peau au moment du tatouage répond au doux nom de Shakki !

Cette méthode ancestrale demande énormément d’expérience, de ténacité et de perfectionnisme. Pour pouvoir dépasser ses préjugés concernant le tatouage, il faut d’abord percevoir le tatouage comme une œuvre dans sa globalité et non comme une forme de paraître. Un tatouage a toujours une signification, qu’elle soit intime ou personnelle, pour celui qui le porte…

Marino pour ojapon.com

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