par 1 Février 2021
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Au XXème siècle, l’occident découvre la vannerie japonaise. Pourtant fabriqués depuis le Xème siècle, ce n’est qu’au XIXème siècle que les paniers issus du tissage du bambou (Takeami) sont reconnus en tant qu’œuvres d’art. Cette façon de travailler le bambou par le tressage (Takezaiku) est un artisanat traditionnel japonais (Kogei).

Plus de six cent espèces de bambou poussent au Japon, dont certaines sont endémiques de l’archipel. Le plus couramment utilisé pour le tissage est le Madake ou Kashirodake car il est flexible et résistant. C’est une plante à croissance rapide, qui une fois coupée ne se décompose pas instantanément et qui peut être utilisée de diverses façons (nourriture, instruments, récipients, armes,…).

Comme les fleurs de pruniers et le pin, le bambou est important pour les japonais, il symbolise la résilience et la persévérance ; la plénitude du néant car il se développe autour du vide (le tronc du bambou est creux). Il est aussi associé à la piété filiale car les rejets de bambou poussent autour de lui comme une famille unie.

D’inspiration chinoise et issu du bouddhisme, le tressage du bambou se lie étroitement  avec les cérémonies du thé macha (Chanoyu), du thé sensha (Senchado) et avec la voie des fleurs (Ikebana). En effet, sous l’ère Meiji, les paniers Hanakago supportant les compositions d’Ikebana et les paniers Karamono (à la chinoise) sont intrinsèquement associés à la cérémonie du thé. Ils apparaissent dans un style naturel et asymétrique (le Wanmono ou style japonais), rappelant la forme d’un vase de bronze ou de porcelaine.

Les premiers lignages de maître voient le jour. L’artisanat du bambou devra cependant attendre la fin du XIXème siècle pour être hissé au rang d’art décoratif japonais traditionnel.

Le rôle des fabricants évolue, ils passent d’artisans à artistes !

Petit bémol cependant ! L’artisanat du bambou est remplacé après la Seconde Guerre Mondiale par le plastique. Qu’à cela ne tienne, il est de plus en plus reconnu et va alors de développer en dehors des limites de l’artisanat.

La préparation du bambou est longue et fastidieuse. Pendant, le processus, il est indispensable d’extraire l’huile contenue dans les fibres afin que le séchage puisse se faire correctement. Tout cela devra être effectué manuellement, ajoutant à la complexité de la manœuvre. Le vannier respecte la matière première que représente le bambou. Lors du tissage, tout est fait pour préserver la fibre des cassures. La structure ne comprendra ni clous, ni attaches autres que des liens végétaux.

Les artistes devenus maître dans le tressage du bambou acquièrent au Japon le statut de « Trésor National Vivant ». Ce fut le cas pour Shono Shounsai, originaire de Beppu (Préfecture de Oita, Région de Kyushu) qui est le premier artiste en tressage du bambou à avoir acquis ce titre, décerné par le gouvernement en 1967.

Douze ans après, l’artisanat du bambou de Beppu est désigné comme « Artisanat traditionnel » par le Ministère de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie.

Le travail du bambou comme tout artisanat demande un long apprentissage auprès d’un maître. Bien sur, chacun est libre de développer son style et sa technique. Cependant, cela reste un métier de tradition et de transmission et cela même si aujourd’hui, certains artisans ne sont pas issus d’une lignée familiale traditionnelle. Ces vanniers contemporains peuvent plus facilement laisser libre cours à leur créativité en proposant des œuvres sculpturales et originales.

Toutefois, les méthodes d’enseignements ont quelques peut changer. Si avant, l’observation du maître était primordiale pour apprendre et comprendre les gestes nécessaires à la pratique, désormais les apprentis sont d’abord formés dans des écoles spécialisées pour y apprendre les techniques de bases avant d’être envoyés en formation.

Le temps de réalisation d’une œuvre en bambou est relativement long. En fonction de la pièce, la durée peut osciller entre plusieurs semaines et une année voire deux. On comprend ainsi pourquoi la profession est peu représentée dans le domaine.

Dans certaines régions où le bambou est plus rare, on lui préférera la vannerie à base de rotin ou de chanvre de palme ou encore de vigne (Tsuruzaiku). En effet, les principaux lieux de confection du tissage du bambou se situent dans les régions du Kansai (Osaka et Kyoto), du Kyushu et du Kanto (dans les environs de Tokyo). Chaque région possède son propre style de tissage et des techniques qui lui son propre.

De nombreux artistes se sont succédés, chacun apportant sa touche personnelle à cet art traditionnel. Quelques créateurs se sont émancipés du carcan de la tradition établie et ont contribué à ériger ce savoir-faire en art. Hayakowa Shokosai est le premier artiste du bambou du Kansai à signer ses créations. Wada Waichisai d’Osaka, lui possédait une technique de tressage raffinée et minutieuse. Son disciple, Yamamoto Chikuryusai fut le premier à voir ses œuvres admises à l’exposition Teiten de l’Académie Impériale des beaux-arts. D’autres ont suivi et se sont également illustrés dans l’art du tressage du bambou, mêlant tradition et modernité.

Plusieurs centaines de modèles de tissage standard existent et servent de base à des combinaisons plus complexes (tissage au peigne, circulaire, en sergé de diamant, hexagonal, simple, octogonal, en croix, … pour ne citer que ceux-ci).

Le tressage du bambou est un thème très représenté dans l’art japonais en général, que ce soit sur les pièces de porcelaine, les tableaux de maîtres, les gravures, tentures et autres objets décoratifs. Tout est prétexte à célébrer le bambou, plante sacrée et assimilée à un ami fidèle et constant !

 

Marino pour ojapon.com

Sources : internet

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